Tétée. cordon placenta lotus

Récit de naissance : Noah

Partager ce récit avec vous est un peu militant. Cela veut dire partager mon intimité et j’en rougis d’avance mais je suis habitée par l'envie de crier sur les toits qu'il est possible de donner la vie comme les femmes le font depuis la nuit des temps...

Avant de parler de cette naissance j’aimerais juste relater un fait qui a ancré en moi la certitude que je pouvais vivre ce moment de façon sereine. Ce moment c’est la première rencontre avec notre sage-femme lors de ma grossesse. Ce jour-là on s’est découvert comme de simples êtres humains qui font connaissance. Elle nous a parlé de sa vie et de ce qui l’a emmené à être sage-femme AAD (Accouchement Assisté à Domicile). Puis nous avons tout déballé : mon cancer détecté il y a deux ans, l’accident de notre fils, notre rapatriement express en pleine pandémie de COVID… Elle s’est tournée vers chéri et lui a dit ceci “Cette femme-là, elle va accoucher toute seule, ce n’est rien accoucher comparé à ce qu’elle a vécu”. Et là j’ai eu les larmes aux yeux. Je me suis dit “Mais c’est évident en fait, je le sais déjà !!!”

Nous sommes le 15 novembre, (date à laquelle j’ai toujours pensé accoucher) cela fait deux nuits que j’ai des contractions qui s’éloignent au réveil. La nuit du 14 au 15 les contractions étaient au point de me réveiller pour certaines mais je continue à dormir. Puis à 6h30 ce dimanche, elles sont trop gênantes alors je décide de me lever et de vaquer à mes occupations. Les contractions disparaissent doucement. Je prépare un petit déj avec mon grand et mon chéri et puis on décide d’aller chercher des œufs chez le voisin Victor. Ce qui est bien c’est que pour aller chez Victor il y a une grosse montée à faire en marchant, je me dis que ça ne peut que m’aider à bien positionner bébé. J’ai déjà vécu une embarcation qui s’éternise pour mon premier et je suis décidée à faire en sorte que bébé trouve la position optimale pour ne pas reproduire ce que j’ai (mal) vécu. Lors de notre visite chez Victor je suis complètement ailleurs je me pends aux arbres pour étirer mon dos en pensant à F ma super SF qui m’avait donné cette idée. Je me sens très bien et quelques contractions font leur apparition. Puis à un moment donné je ressens le besoin de rentrer et ça tombe bien c’est l’heure du déjeuner et notre grand va bientôt crier famine! Pendant que mon chéri et mon grand traînent dehors je rentre et prépare le déjeuner steak haché et haricots verts. J’envoie des messages à mes anges gardiennes de doula qui doivent venir le jour J pour s’occuper de notre grand et de moi au besoin. Après le déjeuner, chéri et le grand partent à la sieste et moi j’ai juste envie de faire pareil. J’ai une sensation familière… Je me sens envahie d’une torpeur irrésistible, une torpeur qui me donne envie de ne RIEN faire juste m’allonger et fermer les yeux même la lumière me gêne. Je me mets sur le lit sur le côté et essaye de dormir un peu, il est peut-être 14h30.

Tout doucement les vagues arrivent. Une à une je surfe tout tranquillement jusqu’à être un peu gênée et avoir envie de bouger. C’est drôle j’ai envie de bouger et en même temps j’ai une flemme phénoménale, ma torpeur devient grande et envahissante. Il est 15h30 quand je réalise que je ne peux plus dormir et que je veux tirer une carte de mon oracle de naissance, je me traîne hors du lit m’agenouille par terre et tire une carte au hasard : INTUITION “Vos intuitions sont belles et puissantes faites leur confiance pour vous guider”. Je ferme les yeux c’est quoi ton intuition Margot réponse au fond de moi “ça ne va pas tarder mais je ne veux pas trop y croire…”. Je me lève et vais trouver chéri a son bureau : “Je crois que tu pourrais chronométrer les contractions”, “Ah Tu crois ?” Nous avons convenu que c’est lui qui gérerait le moment où il faut appeler notre sage-femme (en fonction de mes contractions) de façon à ce que je rentre dans ma bulle sans me poser de questions. Il me suit dans la chambre reste près de moi affalée qui surfent quelques vagues. Puis il repart sans oublier de me dire sa phrase fétiche qui me galvanise “t’es la meilleure doudouna”. Moi je me dis que les contractions sont loin d’être régulières et que “je suis vraiment la championne du faux travail…” Ma torpeur me fait broyer du noir je le sais car je l’ai vécu pour le grand. Et si j’allais prendre une douche chaude j’ai un peu froid ici. Je suis sous l’eau chaude ça fait du bien j’ai de jolies contractions. J’ai la flemme de tout, de sortir de l’eau, de me sécher, de me vêtir. Je le fais tant bien que mal et me regarde dans la glace “il arrive ton bébé” je me dis, j’ai vraiment une tête à accoucher. Je repars dans mon antre.
Wow certaines contractions commencent à me faire vocaliser je ne me contente plus de respirer profondément cela ne suffit pas. Notre grand se lève je pense qu’à ce moment-là il doit être 16h30 environ. Sur certaines contractions j’ai envie de vomir! Dans ma tête : “Ah mince, moi qui pensais que l’envie de vomir annonçait le bébé prochainement je fais exception je suis encore loin” ahahaha…. J’en ris maintenant de ces pensées pessimistes mais c’est ma torpeur. Je tente de vomir aux toilettes, mais pas grand chose ne sort. Je suis troublée je suis complètement ailleurs désormais. Notre grand vient près de moi avec chéri ils me regardent tous les deux et il demande pourquoi je fais des sons comme ça. On lui explique je souris ! Chéri prépare une bouillotte et reviens me la mettre dans le dos cela fait du bien. Il alterne entre le grand et moi. Au bout d’un moment je lui dis qu’il faut installer le matos ce qu’il fait tout calmement mon chéri le plus zen de la Terre ! Je me mets debout car depuis le retour des toilettes j’étais restée plus ou moins affalée sur le lit penchée en avant. Être debout c’est waou ça appuie sur le col je le sens ! Oooooi ouuuuuuuu je vocalises à fond.

Ça y’est mon nid est prêt un matelas est au sol près de mon autel de naissance, chéri a allumé la guirlande de lumière douce faite par mes amies pour l’occasion, et mis une enceinte pour la musique, le jour décline lentement et moi à partir de la je pars définitivement seule dans un autre monde jamais visité. J’entends ma musique c’est la bande originale du grand bleu j’adore! Je me sens sous l’eau justement. Je fais des sons ça m’aide énormément et parfois je pars dans les aigus “aïe oula elle était intense celle là” mais je me reprends sur la prochaine. Les pauses sont fabuleuses délicieuses ! Mon petit garçon vient me mettre la bouillotte dans le dos (bon il la met sur mes épaules ce qui n’aide pas vraiment mais le voir plein de douceur envers moi me fera sûrement l’effet d’un shoot d’ocytocine !). Je m’entends crier sur une contraction “oh ouiiiiiii” et dans ma tête : “mais qu’est-ce tu dis c’est dingue !” En fait certaines contractions me font l’effet de relâcher quelque chose qui fait du bien, c’est fou de dire quelque chose comme ça je m’en rends compte mais c’est ce que je vis. Je suis à quatre pattes sur le matelas et j’entends Océane arriver “Tiens Pascal a dû l’appeler, mais c’est tôt encore non ?”. Je suis heureuse d’entendre sa voix, elle est enjouée et elle gère mon grand immédiatement. A ce moment là il est 18h30 (ce dont je n’ai absolument pas conscience).

Chéri reste avec moi et me relève car je ne sens plus mes jambes à force de rester à genoux. On se sert fort dans les bras, je sens son odeur, il me dit à nouveau sa phrase à lui, ça me fait du bien car les contractions sont vraiment intenses debout. Il me demande si je veux enlever mes vêtements. Non pas encore. Je dis “F ?” (notre sage femme) et il dit “elle arrive dans 5 min” Cette question résume à elle seule la fameuse phase de désespérance même si je me sentais loin d’être désespérée !!! J’attendais justement cette phase avec appréhension et au final je l’attends toujours ahaha. J’étais plutôt lassée d’avoir enchaîné quelques contractions intenses et je me disais que si ça durait jusqu’à demain matin comme cela j’allais peut-être avoir besoin d’aide.

Malgré l’intensité j’ai de magnifiques pauses c’est d’ailleurs cette impression de longue pause qui me faisait douter de l’avancée du travail (au final sur l’appli de chéri je découvrirais des jours plus tard que les contractions s’enchaînaient aux 1 minutes…). Jusqu’à ce que je sente pousser je me demandais si je n’étais pas revenu à des contractions irrégulières de début de travail! Au bout d’un moment je m’entends différemment, j’ai le souffle un peu coupé à la fin de la contraction, je force malgré moi. C’est quoi ça ? Oh purée bébé descend … Chéri revient, je mets les doigts dans mon vagin et je sens comme une boule souple et molle de la taille d’une balle de ping-pong “Je sens la poche des eaux tout va bien” je dis (quelque chose comme ça) Il me déshabille, “pas les chaussettes !” Lol je garde en tête la délivrance et l’importance de la chaleur aux extrémités. Je suis hyper lucide en fait et en même temps j’ai du mal à recoller les morceaux donc je devais être vraiment ailleurs, que de paradoxe ! Me voila nue enfin en chaussettes chaudes a quatre pattes sur le matelas au sol. Je vérifie a nouveau dans mon vagin et sens la poche qui avance. Puis F entre très discrètement, je sens son odeur dans la pièce et je la vois vaguement. Mes yeux sont fermés. Elle se place derrière moi et pose ses mains sur le bas de mon dos et me masse avec de l’huile. Son touché est juste divin, je me sens aimée, chérie par ce contact très doux et en même temps fort rassurant. Elle et chéri parle de saladier, de tabouret, je les entend au loin.

Une contraction arrive et la j’ai l’impression que je vais faire caca d’une pastèque ! Ou plutôt d’un melon, cette sensation je le sais c’est mon bébé qui arrive je n’ai pas peur. J’accompagne la contraction je suis sur les genoux le corps relevé, très verticale (j’ai du demander à chéri et ma SF dans quelle position j’étais tellement je n’en avais pas conscience). Je pousse malgré moi j’ai l’impression de ne rien faire de spécial juste de suivre ce qui s’impose à mon corps. Puis une petite sensation de brûlure au niveau de la vulve, le couronnement, je le sais la tête est en train de passer. Mon cerveau est complètement ailleurs, c’est intense je suis l’intensité moi même c’est vraiment le point culminant de cette naissance. J’entends F me dire “la tête est sortie” . Je mets la main entre mes jambes et là je sens une tête toute chaude toute petite. Oh ce moment !!! Puis j’attends …. Mon corps pousse et quand je réouvre les yeux je vois un bébé entre mes jambes sur le matelas ! C’est mon bébé il est là !

Je n’y crois même pas, d’ailleurs je ne fais que dire “incroyable incroyable” ! Bébé pleure un tout petit peu et s’arrête dès que je le touche je lui prend la main et lui caresse le dos. Il est tout doux, tout chaud, tout mignon. Je vois que c’est un petit garçon! Je le prends je l’amène contre moi. F et chéri m’installe confortablement allongée sur le matelas.

Mon bébé tu es là. C’est incroyable je le pense encore. Tu sens si bon et tu es si doux, tout chaud. Tous les sens en éveil, je me dis avec du recul que pas une photo ne pourra jamais retranscrire cette magie de la rencontre avec toi, tes petits bruits ton odeur ton touché tes yeux tout est si intense. F s’occupe du placenta je ne le sens même pas sortir mais je le découvre je l’avais manqué pour mon premier et là je suis ravie de le regarder. Il est trop beau et on ne le coupera pas encore non pas ce soir. Ce soir mon bébé et son placenta resteront contre moi. F vérifie : pas une déchirure, pas une éraillure rien du tout, périnée intacte. Mon bébé est tout calme contre moi, il tète il est bien éveillé, on vérifie que c’est bien un garçon ahaha car chéri lui n’a pas vu ! Tout est si simple en fait. Puis Océane et mon grand entrent et mon grand découvre son petit frère, c’est un moment mémorable il est tout heureux et il se met tout nu pour faire comme nous c’est trop chou. Ma cousine arrive aussi je suis tellement heureuse d’être si bien entourée. Océane et Amandine m’aident à me mettre une culotte et une couche ahaha. Je me laisse bichonner. Puis chéri vient se mettre en peau à peau avec bébé pendant que je me lève tout doucement et vais manger une soupe préparée par ma petite fée. On passera la nuit tout nus sous les couvertures avec une petite couche sur bébé et une pièce bien chauffée. Première nuit d’amour avant bien d’autres ! C’est vraiment comme ça que cela doit se passer, il n’y a pas plus normal et logique. Tout ce que l’on vit me semble à la fois extraordinaire et à la fois un événement banal, normal, la vie continue…

PS

PS : J’ai vécu cette naissance dans un autre monde, une autre planète comme le dit M. Odent. Mon Chéri aime me rectifier et dire que selon lui je n’étais pas vraiment ailleurs, j’étais au plus profond de moi-même et j’aime aussi cette idée d’ailleurs au creux de soi… Je ne me souviens absolument pas des heures ni même de l’ordre de certaines étapes cela a été un réel effort de rédiger ce récit. Pour être tout à fait honnête je n’ai aucun souvenir de douleur, certes c’était intense par moment mais vraiment je ne pourrais jamais dire que j’ai souffert ! Noah est né “coiffé” (dans sa poche jusqu’à la sortie de son corps) à 19h12 tout a été très rapide, c’était presque pas assez long à mon goût ! Mais bon je l’ai cherché puisqu’il ne s’est quasi pas passé un jour pendant la grossesse sans que je me dise “tu vas accoucher vite et sans douleur” le pouvoir de la pensée !

Mon Noah, merci merci de m’avoir choisie pour maman je t’aime à l’infini et ta naissance restera à jamais un des plus beau cadeau de ma vie !

Margot ♥